LA BOMBARDE

Histoire et quelques conseils
 
  1. Les chalumeaux
  2. La bombarde  
  3. Sortir un son ?  

1. Les chalumeaux

a. l'antiquité

Les chalumeaux sont sans doute apparus en Afrique du nord il y a très, très longtemps. On trouve la trace de leur présence en grand nombre en Egypte ancienne. Mais cet empire étant alors multiculturel, il est tout à fait possible qu'il s'agisse d'une importation. Il est possible aussi que le procédé fut inventé à plusieurs endroits différents. Le principe du chalumeau est simple: une anche double en roseau et un tube de bois pour amplifier, diriger et moduler le son. L'Egypte puis la puissance de Rome rayonnèrent tellement en Europe que ces instruments furent adoptés dans tout le bassin méditerranéen, dans toute l'Europe et aux frontières de ces empires, puisqu'on le retrouve jusqu'en Inde. Mais si l'Egypte exporta le modèle du chalumeau simple au proche-orient, les romains, plus inspirés par des soucis d'ordre militaire, répandirent le modèle de la cornemuse. Qu'est-ce qu'une cornemuse? c'est une poche que l'on rempli d'air et qui permet de souffler dans le chalumeau en continu. De plus, on peut lui adjoindre un bourdon. Ainsi, le musicien peut marcher des heures en sonnant le pas de la troupe... et oui, non seulement malgré les idées reçues les bretons antiques ne connaissaient pas la bombarde mais en plus ce sont les légionnaires romains qui ont exporté la cornemuse! Alors imaginez ces gaulois héroïques se retourner dans leurs tombes lorsque l'on parle de "musique celtique" !!! Les pipes bands écossais, strictes et disciplinés, descendent tout droit de la tradition de parade militaire romaine. Les "triomphes" romains ont d'ailleurs directement inspiré l'organisation des défilés de "cercles celtiques" où chaque costume représente une tribu... Ils n'ont rien à voir avec les guerriers celtes, connus pour leur désordre et leur individualisme et à qui le sens de la liberté et de la fierté interdisaient bien de marcher au pas.

b. le Moyen Age

On l'a vu, le chalumeau est de structure fort simple. Avec le développement des outillages, il était à la portée de tous de fabriquer ce genre d'instrument. On trouve donc des chalumeaux à toutes les époques, et aux quatres coins des régions du monde que nous avons évoquées plus haut. Ceci dit, ils étaient rarement justes, du moins, selon les critères de la musique classique occidentale... Mais le pire, ou peut-être le mieux, c'est qu'ils étaient tous différents. On peut pratiquement affirmer qu'il exista autant de sortes de chalumeaux qu'il y a eu de luthiers, même si quelques efforts de standardisation existèrent probablement suite aux succès rencontrés par telle ou telle version. Guillaume de Machaut évoquait la chalémie et la cromorne, deux standards très répandus et encore pratiqués de nos jours. Avec le temps et la spécialisation des métiers, les régions finirent par trouver chacune leur chalumeau et cornemuse typique. D'un autre côté et un peu plus tard, la cour des rois se passionna pour les musiques traditionnelles qui changeaient des chants grégoriens. On assiste alors à l'apparition du haut-bois, un chalumeau de salon (au son moins volumineux) qui accompagnait la musette de cour et qui fut tellement populaire et si prestigieux qu'il finit par donner son nom à toute la famille. En musique classique, on ne dit plus les chalumeaux mais les hauts-bois.

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2. La bombarde

En bretagne, apparut la bombarde. Mais est-elle une standardisation locale du chalumeau comme ce fut le cas pour le haut-bois du Poitou, la tarota de Catalogne, la bouzine? Une légende raconte qu'elle fut rapporté de Syrie par un croisé. Ce qui est sûr, c'est que l'apogée de la bombarde remonte au XVIII sciècle. Cet instrument si puissant, associé au biniou pouvait comme aucun autre faire danser autant de monde à la fois. Plusieurs villages pouvaient se joindre! On en jouait, dit-on*, de préférence la nuit, peut-être pour éviter les patrouilles royales qui craignaient les rassemblements populaires (et cela nous fait penser aux rave-parties d'aujourd'hui!...). La dépendance de la Bretagne au royaume de France était toujours contestée et c'est sans doute pour cela que cet instrument importé est devenu un symbole d'identité culturelle. (* NB.: Pour ma part, je n'ai encore pas vu de gravure ou de peinture représentant une fête de nuit au XVIIIème en Bretagne autre que celles de la St Jean, c'est à dire ou la foule et les musiciens seraient éclairés par des torches, un feu ou des lampes à huile ; si vous possédez une représentation de ce genre, vous me feriez grand'joie de me la montrer!)

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Oublions un peu l'Histoire et voyons ce qu'est cet instrument légéndaire:

Il est composé :

- d'un corps : cylindre de bois de perce légèrement conique
- d'un pavillon : reliquat de l'antique perce conique évasée

Le corps est percé d'une ligne de six trous comme les flûtes irlandaises et aujourd'hui on y ajoute des clefs permettant d'abord de descendre en sous-tonique et de plus en plus de permettre un jeu chromatique. En effet la bombarde possède comme beaucoup d'instruments traditionnels une gamme diatonique. Ce qui veut dire que toutes les notes ont un nom différent (par ex. s'il y a un Ré naturel et un Ré dièse, on appellera ce dernier Mi bémol ce qui implique qu'il n'y ait pas de Mi naturel), ce qui veut dire aussi qu'elle en possède naturellement moins.

Mais le son est produit par une anche double en roseau. Celle-ci vibre sous l'effet de la forte pression d'air que le talabarder (joueur de bombarde) lui envoit. Les vibrations sonores sont donc dirigées et "transformées" par le corps de la bombarde (la longueur, le bois,...). Les lèvres du talabarder jouent également un rôle primordial dans la qualité du son produit.

La bombarde est traditionnellement percée dans le buis, mais cela est loin d'être une règle, on trouve d'ailleurs aujourd'hui une majorité de bombardes en ébène.

Il existe des bombardes en Sol, en La (sud bretagne) et (sous influence outre-manche?) en Ré. Mais les bagadoù ont opté comme l'ont fait les pipe-band écossais, pour les gammes traditionnelle de Si bémol et Do mineur ; ce qui fait que la majorité des productions de bombardes sont en Si bémol. Le biniou qui l'accompagne en couple est donc lui aussi très souvent en Sib. Les gammes utilisées avant la normalisation des instruments (normalisés sur la gamme occidentale tempérée) étaient assez étrangères des gammes fixées par l'Eglise. En étudiant des spécimens très anciens, il s'avère même que le biniou n'était pas ajusté à la bombarde (ou inversement), non pas de façon accidentelle par un mauvais luthier mais de façon systématique. Et qu'à nos oreilles comtemporaines, cela sonnerait drôlement faux... Cette énigme expliquerait peut-être une partie de la mauvaise réputation de ces instruments que la difficulté de maîtrise tend (en oubliant le violon) à accentuer!

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3. Sortir un son ?

La première fois que l'on souffle dans une bombarde, on obtient généralement (si on obtient quelque chose) un son entre le klaxon et la sirène du premier mercredi de chaque mois...

Pour sortir un joli son de sa bombarde, il faut :

une bonne bombarde, une bonne anche et ....
quelques cours et beaucoup d'acharnement. Avec en prime un bon professeur on y parvient en un an ou deux. Mais surtout, ne pas se décourager, les progrès faits chaque jour sont de véritables bonheurs ! ! !

Quelques petits conseils cependant :

La "pince" de l'anche de bombarde est très différente de la "pince" de l'anche de haubois par exemple. Au départ on conseille aux débutants de ne pas pincer l'anche du tout, la "pince" viendra progressivement avec l'expérience. La raison? pincer l'anche modifie énormément le son, il baisse le volume, monte les aigues... et bousille l'anche quand c'est mal fait....
Il faut se tenir droit, debout c'est encore plus facile, tenir la bombarde droite (en un angle de 90° par rapport au corps) et non pas penchée comme le haubois. Poser les lèvres sur l'anche pile entre la partie lisse et la partie taillée. Prendre de grande respiration et souffler avec le ventre, voir le bas ventre comme les chanteurs d'opéra. Pousser avec les abdominaux et non pas les poumons. La pression d'air doit être suffisante et ... REGULIERE!!! donc pensez à respirer souvent et aux bons moments.

Si vous ne parvenez toujours pas à sortir un son c'est que l'anche est peut-être trop "dure" pour vous. Chaque talabarder doit trouver l'anche qui lui correspond. (c'est là que ça coince car une anche coûte cher et qu'on a pas toujours l'occasion de les essayer en magasin). Pour le savoir essayez de souffler juste dans l'anche c'est à dire sans la poser sur la bombarde. Si vous devez soufir pour qu'elle sorte un son (strident...) c'est qu'elle n'est pas faite pour vous. Inversement si elle "couïne" trop vite, c'est qu'elle est trop "douce". Si elle est trop dure et que vous ne pouvez pas vous en procurer une autre, il y a encore une solution réservée normalement aux plus experts... : le grattage.

Sortir un joli son d'une bombarde est un défi pour le débutant. C'est pourquoi, d'ailleurs, on conseille de suivre nos cours au moins une année!

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CREDITS :

L' historique est une rapide synthèse de ce que j'ai pu lire sur l'Histoire de la musique et de la bombarde en particulier. Aucun ouvrage ne me vient à l'esprit mais je conseillerai toute fois la Cité de la Musique à Paris pour ses éditions et sa bibliothèque et de même pour la F.A.M.D.T.à Parthenay.

Les conseils de pratique sont un résumé des cours que nous donnons en première année de bombarde. Je remercierai tout particulièrement mes maîtres (dans l'ordre chronologique) : Jézabel et Alan.

Gildas